Pour avoir « fauché » une chaise dans une succursale de la banque BNP Paribas à Paris, le 19 octobre 2015, Jon Palais a comparu lundi 9 janvier devant le tribunal correctionnel de Dax (Landes) pour « vol en réunion ». Alors qu’il risque cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende, la juge Florence Bouvier a renvoyé la décision au 23 janvier.

Dans ses réquisitions, le procureur de la République, Jean-Luc Puyo, a estimé qu’« une dispense de peine » était « de nature à satisfaire la société », car il s’agit d’un « mouvement pacifiste et bon enfant ». M. Palais, quant à lui, a réitéré à la barre que son acte était « une manière de dénoncer le vol constitué par un système organisé d’évasion fiscale ».

C’était le premier rendez-vous des faucheurs de chaises avec la justice, soit plusieurs centaines de militants écologistes et altermondialistes qui, entre septembre et décembre 2015, à l’occasion de la conférence sur le climat, la COP21, qui se tenait à Paris, avaient « réquisitionné » 196 chaises – le nombre de parties engagées dans la conférence onusienne.

Ils expliquaient alors que les sommes détournées par l’évasion fiscale et la fraude des banques pourraient servir à financer la « transition écologique et sociale », alors que les nations peinaient à trouver l’argent pour « financer l’adaptation des pays du Sud au changement climatique ».

« 19 000 milliards d’euros dans les paradis fiscaux »

Ce sont entre 60 milliards et 80 milliards d’euros qui, chaque année en France, disparaissent, manquant aux finances publiques. Au niveau européen, cette somme est de 1 000 milliards d’euros et, selon les organisations orchestrant la campagne de dénonciation, « plus de 20 000 milliards de dollars [19 000 milliards d’euros] sont abrités dans les paradis fiscaux ».

Après une quarantaine d’actions de fauchage de chaises dans les succursales de plusieurs banques (menées par les militants des Amis de la Terre, d’Attac, d’Action non violente-COP21 (ANV-COP21), d’Alternatiba ou de Bizi (organisation basque qui milite sur les questions sociales et climatiques), un « sommet des 196 chaises » s’est tenu à Montreuil (Seine-Saint-Denis), le 6 décembre 2015 durant la conférence sur le climat.

Deux mois plus tard, les chaises étaient déposées sur le pont au Change, au cœur de Paris, qui mène au palais de justice, à l’occasion de l’ouverture du procès de Jérôme Cahuzac, ancien ministre du budget (socialiste) accusé notamment de fraude fiscale.

Le procès de Jon Palais, le militant est défendu par les avocates Eva Joly (candidate écologiste à l’élection présidentielle de 2012) et Catherine Joly (sa fille), est celui de l’évasion fiscale, des scandales financiers – « affaire Cahuzac, Panama papers, LuxLeaks, HSBC » –, promettent ces organisations. De nouvelles actions ont été organisées, en novembre et en décembre 2016, dans les succursales de la BNP pour dénoncer les poursuites engagées par la banque : émission d’une radio pirate dans une agence bancaire, installation d’une salle d’opération chirurgicale, d’une crèche… autant de mises en scène destinées à illustrer ce à quoi pourrait servir l’argent détourné par des pratiques illégales.

Un rassemblement militant, à l’appel de plusieurs dizaines d’organisations, en plus de celles à l’initiative de la campagne de réquisition des chaises, (dont la Confédération paysanne ; Greenpeace ; Oxfam ; Réseau Action climat ; la FSU ; SUD et CGT-Finances ; le CCFD ; 350.org ; Emmaüs…) est annoncé à Dax, lundi.

Et de nombreuses personnalités ont été citées à comparaître et tenaient une conférence dans la matinée : le philosophe Edgar Morin, José Bové, plusieurs candidats à l’élection présidentielle ou à la primaire de la gauche : Philippe Poutou (NPA), Yannick Jadot (EELV), Benoît Hamon (PS)…

 

Vialemonde