L’inflation causée par le conflit en Ukraine, « c’est le prix à payer pour défendre nos valeurs », estime le gouverneur de la Banque de France

« Depuis le premier jour de l’invasion de l’Ukraine, les Européens ont fait un choix économique courageux », a déclaré sur franceinfo lundi 23 mai François Villeroy de Galhau, à l’occasion de l’ouverture du Forum économique mondial de Davos, largement consacré aux conséquences économiques de la guerre menée par le Kremlin. Pour le Gouverneur de la Banque de France, « Nous savions que cela signifierait moins de croissance, plus d’inflation, mais d’une certaine manière, c’est le prix à payer pour défendre nos valeurs. »

franceinfo : le monde économique a-t-il aussi un rôle à jouer dans le conflit en Ukraine ?

François Villeroy de Galhau : Depuis le premier jour de l’invasion de l’Ukraine, les Européens et les démocraties en général ont fait un choix économique courageux. Nous savions que cela signifierait moins de croissance, plus d’inflation, mais d’une certaine manière, c’est le prix à payer pour défendre nos valeurs, pour défendre l’Ukraine et sa liberté. Il y a aussi eu un appel à l’aide, déjà à très court terme, sur la situation financière de l’Ukraine. Il m’est arrivé d’assister à une réunion du G7 en Allemagne la semaine dernière et la somme de 19 milliards d’euros pour aider l’Ukraine a déjà été levée, ce qui est plus que prévu. Je crois que la mobilisation est déjà très forte et c’est un cas où, en faveur de la démocratie, de la solidarité, de la paix, nous acceptons de payer un prix économique.

La présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde sera à Davos demain, elle explique que la BCE sortira des taux négatifs d’ici la fin du troisième trimestre, ce qui signifie une hausse des taux directeurs d’ici septembre, c’est le bon timing ?

Avant de revenir aux taux, il faut revenir à ce qui est la cause de nos actions, c’est-à-dire l’inflation. En France, il est nettement inférieur à la moyenne de la zone euro. Nous sommes autour de 5% contre plus de 7%. C’est déjà trop pour nos concitoyens et ce n’est pas qu’un choc énergétique. On pourrait dire que l’inflation n’est pas seulement plus élevée qu’avant, elle est aussi plus large, c’est-à-dire qu’elle se propage à un ensemble de biens et de services. C’est le signe que la banque centrale doit agir dans le sens de ce qu’on peut appeler la normalisation.

Cela signifie-t-il que l’argent coûtera plus cher?

Cette normalisation est une forme de retour à la normale. Jusqu’à présent, il n’y avait pas assez d’inflation et donc nous avions de l’argent qui était à des taux exceptionnellement bas, voire des taux négatifs pour les États. Ici, nous allons commencer par lever le pied de l’accélérateur d’inflation. Elle n’est plus nécessaire aujourd’hui et nous reviendrons à des conditions de taux qui resteront favorables. Celle-ci a un objectif essentiel, qui est de ramener l’inflation à 2 % d’ici 2024. Ce n’est pas seulement notre prévision, c’est notre engagement.

 

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