Trump a vendu aux américains une administration qui se veut moins va-t-en-guerre, plus respectueuse de ses concurrents et surtout plus ouverte sur le dialogue avec la Russie. Or, on constate que les tête d’affiche de son gouvernement sont tous des bellicistes pur et dur et foncièrement russophobes. On est donc très mal parti. Trump cumul en plus 3 tares qui ne devraient pas améliorer les choses.
Il semble très influençable (il affirmait que la Russie n’avait pas piraté les élections puis s’est fait retourner le cerveau par les agences de renseignement et a changé d’avis), c’est une vraie girouette (d’abord il voulait mettre Hillary Clinton en prison puis, moins d’un mois plus tard, Hillary et son mari deviennent des gens biens à ses yeux) et enfin, il est le président certainement le plus pro-israélien de ces dernières décennies. Or, la paix au Moyen-Orient n’est absolument pas une priorité pour Israël, bien au contraire. Elle va jusqu’à affirmer qu’elle s’oppose à la défaite de daesh et qu’elle soigne les terroristes d’al nosra par intérêt. Sans parler du fait qu’ils effectuent régulièrement des raids aériens ciblant l’armée syrienne et ses infrastructures, y compris à Damas. Rien de mieux pour faciliter le travail des terroristes sur place.
Pour finir, même si Trump compte réellement tenter d’apaiser la situation avec la Russie, le fait qu’il soit entouré de chiens de guerre comme Mattis, McCain et Graham qui ont juré d’écraser la Russie ou le Chef d’État-Major de l’armée qui est tout aussi agressif, risque de poser de sérieux problèmes pour accomplir cet objectif. Trump va devoir composer avec de fortes pressions qui semblent omniprésentes au sein de son administration et des forces armées américaines.
Le général James «Mad Dog» Mattis, le candidat désigné par le président élu Donald Trump pour être secrétaire à la Défense, a utilisé son audition de confirmation devant le Comité des forces armés du Sénat jeudi pour décrire une politique de guerre agressive, désigner la Russie et la Chine comme des ennemis et appeler à une augmentation importante des dépenses militaires, y compris la «modernisation» des armes nucléaires et l’accroissement de la cyberguerre.
Tous les démocrates et les républicains – ont fait l’éloge de Mattis pendant l’audience de trois heures et demie. Pas un seul sénateur n’a demandé au candidat comment il pourrait réduire les guerres américaines, qui font actuellement rage dans plusieurs pays.
Au lieu de cela, les sénateurs ont rivalisé entre eux en appelant Mattis à identifier les menaces à la «sécurité nationale» auxquelles l’administration Trump sera immédiatement confrontée. Aucun sénateur, y compris la démocrate de gauche Elizabeth Warren, du Massachussetts, n’a évoqué le bilan de l’occupation de l’Irak de général retraité des marines, conflit dans lequel il a été impliqué dans des crimes de guerre.
Mattis a mené la sauvage contre-offensive des Marines qui ont repris la ville irakienne de Falloujah en décembre 2004, et il a ordonné un bombardement aérien cette année là contre une fête de mariage dans laquelle plus de 40 civils ont été tués.
Il n’a pas non plus été interrogé au sujet d’un discours public qu’il a prononcé dans lequel il a déclaré qu’il était «amusant» de tuer certaines personnes. Jusqu’à jeudi, Mattis n’était pas légalement éligible pour être le secrétaire de la défense. La loi fédérale empêche de choisir un individu qui a quitté l’armée moins de sept ans auparavant, une règle destinée à protéger le principe démocratique de subordination militaire au gouvernement civil élu.
Immédiatement après l’audience, le Comité des forces armées a voté à 24 contre 3 pour renoncer à la cette loi à la faveur de Mattis, qui a pris sa retraite il y a seulement trois ans, après quoi il a pris un siège au conseil d’administration du géant de la défense, General Dynamics. Le Sénat au complet a rapidement suivi, votant à 81 contre 7 en faveur de l’abrogation.
Lors d’un échange particulièrement inquiétant pendant l’audience, Mattis a été interrogé par le président du comité, le républicain John McCain, pour savoir s’il croyait ou non que l’ordre mondial subissait sa plus grande tension en 70 ans. Mattis a répondu: «Je pense que ce sont les plus grandes attaques depuis la Seconde Guerre mondiale. Et elles proviennent de la Russie, de groupes terroristes et de ce que fait Chine en mer méridionale.» Plus tard au court de l’audition, Mattis a dit: «L’Amérique a des responsabilités mondiales et cela n’est pas à notre avantage de laisser ces zones du Monde absentes de nos efforts. «
Les questions des sénateurs et les réponses de Mattis confirment qu’il n’y aura pas de fin à ces guerres mondiales. Les Etats-Unis « seront engagés dans un conflit mondial dans un avenir prévisible », a déclaré McCain. «Penser autrement est un vœu pieux … Le pouvoir dur est important, le détenir, menacer, tirer parti de la diplomatie et parfois l’utiliser. »
Bien qu’il se soit efforcé de souligner l’importance des alliances américaines, en particulier de l’OTAN, Mattis, tout comme McCain, ont adopté l’unilatéralisme militaire. Le candidat a déclaré que les États-Unis ont seulement « deux pouvoirs fondamentaux », dont un qu’ il a appelé « le pouvoir d’intimidation. » Ce qui est nécessaire pour faire usage de l' »intimidation » des autres nations est que l’armée américaine soit « au top dans une compétition où la deuxième place est la dernière. »
En commençant par McCain, les sénateurs ont invité à plusieurs reprises Mattis à dénoncer la Russie et à se distancier de la position présidentielle du président élu Trump par rapport à Moscou et son conflit ouvert avec les agences de renseignement américaines sur des allégations non fondées de «piratage» russe des élections américaines.
Mattis a qualifié la Russie de «concurrent stratégique» et a déclaré que le président russe Vladimir Poutine essayait de «briser» l’alliance de l’OTAN, qu’il considérait comme la plus grande alliance militaire de l’histoire. « Il y a un nombre décroissant de domaines où nous pouvons coopérer activement et augmenter le nombre de domaines où nous allons devoir faire face à la Russie », a déclaré Mattis. Il a également signalé sa déférence envers les agences de renseignement américaines, disant qu’il a un « très, très haut degré de confiance dans notre communauté de renseignement. »
Lorsque le sénateur démocrate Martin Heinrich du Nouveau-Mexique lui a demandé d’identifier les « principales menaces » aux États-Unis, Mattis a commencé avec la Russie, mais a élaboré une liste qui pourrait inclure n’importe quelle nation dans le Monde. « Je considérerais la principale menace comme étant la Russie », a répondu Mattis, » mais aussi toutes les nations qui cherchent à intimider que ce soit avec des armes de destruction massive ou autre avec des moyen inhabituels et peu orthodoxes.
Ce thème a été repris par Warren, qui, aux côtés du sénateur Vermont Bernie Sanders, est promu comme le visage «de gauche» du Parti démocrate.
« La Russie veut promouvoir sa sécurité par l’instabilité … en essayant de créer une sphère d’États instables le long de sa périphérie », a déclaré Warren. « En tant que secrétaire de la Défense, en ce qui concerne les menaces posées par la Russie, plaiderez-vous franchement et énergiquement devant le président pour parler de ces menaces et de la nécessité de les prendre au sérieux? » Mattis a affirmé qu’il le ferait. «Nous comptons sur vous,» a plaidé le sénateur libéral.
Parfois prenant un ton plus militariste que le candidat, les sénateurs ont également encouragé Mattis à faire des déclarations belliqueuses contre la Chine, l’Iran et la Corée du Nord, et ont sollicité des déclarations selon lesquelles les Etats-Unis – qui consacrent chaque année plus à l’armée que les huit plus grandes économies du monde combinées -sous-financent le Pentagone. Les membres du Comité, Warren et la démocrate du Missouri Claire McCaskill, ont utilisé appelé à de nouvelles dépenses importantes sur l’arsenal nucléaire, la garde nationale et la cyberguerre.
Mattis n’a pas démenti les déclarations de Rex Tillerson, l’ex-PDG d’Exxon proposé par Trump au posté de Secrétaire d’État, selon lesquels les États-Unis devraient empêcher la Chine d’accéder à la mer de Chine méridionale – un acte de guerre en soit. Mattis a appuyé la conclusion selon laquelle la Chine, dans ses projets de revendications territoriales, «militarise» la mer de Chine méridionale.
Mattis a déclaré son soutien à l’agression accrue des États-Unis au Moyen-Orient, en disant au Comité que la guerre contre l’Etat islamique en Irak et en Syrie devait être placée sur «un calendrier plus agressif».
Dans un document soumis au comité avant l’audition, Mattis a identifié l’Iran comme la «plus grande force de déstabilisation au Moyen-Orient» et a déclaré que l’administration Trump devrait «mettre en échec l’objectif d’hégémonie régionale de l’Iran». Dans des déclarations précédentes, il a affirmé que L’Etat Islamique n’était rien de plus qu’un cheval de Troie pour Téhéran pour projeter son influence. Cependant, invité par les sénateurs à désavouer l’accord nucléaire avec l’Iran conclu par l’administration Obama et cinq autres puissances, Mattis a déclaré qu’il le soutiendrait.

Jeudi, le Comité du renseignement du Sénat a également tenu une audience pour le candidat de Trump à la tête de l’Agence centrale de renseignement, Mike Pompeo, un ancien député du Tea Party provenant du Kansas avec des liens étroits avec les multimilliardaires frères Koch. On s’attend également à ce que la nomination de Pompeo soit ratifiée avec peu de résistance des démocrates.
Le témoignage de Pompeo se distingue par sa position belligérante envers la Russie. Il a confirmé le rapport des agences d’espionnage des États-Unis au sujet du piratage, bien que ce rapport ne contenait pas le début d’une preuve et qu’il a été préalablement remis en question par Trump.
« En ce qui concerne ce rapport en particulier, on voit clairement ce qui s’est passé ici, sur la participation de la Russie dans les efforts pour pirater l’information et avoir un impact sur la démocratie américaine », a déclaré Pompeo. « Il s’agissait d’une action agressive prise par les hauts dirigeants en Russie. » Celui-ci a également accusé la Russie d ‘ »envahir et d’occuper l’Ukraine, de menacer l’Europe et de ne rien faire pour aider à la destruction et à la défaite de l’Etat Islamique ».
La lutte acharnée sur les allégations de « l’ingérence » russe dans les élections américaines se résume à un différend sur la politique étrangère pour savoir s’il convient ou non de s’attaquer d’abord à la Russie, ou de se concentrer sur une confrontation avec la Chine. L’hystérie médiatique et l’intervention de l’appareil de renseignement et des républicains de premier plan tels que McCain pour appuyer ces allégations équivaut à une tentative pour s’assurer que l’administration Trump va intensifier la politique anti-Russe de l’administration Obama qui aurait été le premier ordre du jour d’une administration menée par Hillary Clinton.
La performance des démocrates, y compris sa faction « de gauche » dirigée par Warren, démontre qu’il n’y a pas de faction de la paix au sein de la classe dirigeante américaine. Quelles que soient leurs différences transitoires sur la cible immédiate, le tournant vers la guerre pour poursuivre les intérêts de l’oligarchie capitaliste américaine est la politique consensuelle menée par les deux parties.