Le 25 juillet 2010, Wikileaks entamait la diffusion de dizaines de milliers de câbles sur la guerre en Afghanistan. Retour sur l’histoire de l’«agence» fondée par Assange, qui risque 175 ans de prison en cas d’extradition vers les Etats-Unis.
«Première agence de renseignement des peuples» : c’est ainsi que se définit Wikileaks. Fondée en 2006 par Julian Assange, l’organisation est spécialisée dans la diffusion à grande échelle de dizaines de milliers de documents militaires, diplomatiques ou économiques, classés confidentiels, révélant des bavures, des collusions et des échanges entre hauts dirigeants du monde, dans l’intérêt de l’information publique et afin de lutter contre les secrets des puissances.
Si l’équipe de ses fondateurs est réputée avoir d’importantes compétences en informatique, c’est surtout par le biais d’informations fournies par des lanceurs d’alerte, travaillant à l’intérieur même des armées ou des administrations, que Wikileaks a marqué l’Histoire.
L’un de ses premiers faits d’armes au retentissement international a lieu en 2007, quand Wikileaks parvient à rendre publiques les procédures – classifiées – appliquées aux détenus soupçonnés de terrorisme de la prison américaine de Guantanamo, à Cuba. Quatre ans plus tard, Wikileaks publiait les dossiers détaillés de 779 détenus du camp. Ils contiennent de nombreux détails inédits, révélant entre autres les interrogatoires, des photos, des rapports médicaux et des mémos. Selon les informations publiées, plus de 150 innocents d’origine afghane et pakistanaise ont été détenus pendant des années sans chef d’accusation. Le public y apprenait également l’âge du plus jeune détenu de Guantanamo, 14 ans, et celui du plus âgé, 89 ans.
2010, l’année qui a fait péter un «câble» à Washington
Mais c’est en 2010 que le monde entier découvre la force de frappe de Wikileaks. Cette année-là, un torrent de révélations sur les guerres d’Irak et d’Afghanistan envahit la presse internationale, plongeant Washington dans un embarras inédit. Le premier gros coup mémorable de Wikileaks a été la diffusion, le 5 avril 2010, de la vidéo d’une bavure de l’armée américaine à Bagdad, en 2007, ayant coûté la vie à une dizaine de civils dont deux journalistes de l’agence Reuters. Cette vidéo, intitulée «Collateral murder», réalisée depuis un hélicoptère Apache, a été obtenue par Wikileaks par le truchement du soldat américain de 22 ans Bradley Manning, devenu Chelsea après une opération de changement de sexe, arrêté puis inculpé par l’armée, dans laquelle il était analyste informatique.
Après ce premier document choc, qui met aujourd’hui encore l’administration américaine dans l’embarras, il y a exactement dix ans, le 25 juillet 2010, Wikileaks opérait son second gros coup en rendant publics plus de 70 000 documents confidentiels sur la guerre d’Afghanistan, avec des révélations concernant notamment les victimes civiles et les liens supposés entre le Pakistan et les insurgés, déclenchant un scandale d’envergure internationale.
Nous voulons trois choses : libérer la presse, révéler les abus et créer et sauvegarder les documents qui font l’Histoire
Après ces révélations explosives, une enquête criminelle sur Wikileaks est ouverte aux Etats-Unis. Hasard du calendrier ? Moins d’un mois plus tard, le 21 août 2010, Julian Assange est accusé de viol par la justice suédoise. Il dénonce un complot en lien avec les Etats-Unis visant à le punir de son travail. Cette affaire le poursuivra durant des années, la justice suédoise ouvrant et refermant l’enquête à plusieurs reprises avant d’aboutir à un non-lieu, abandonnant enfin toute poursuite en mai 2017. Ayant épuisé tous les recours juridiques pour échapper à une extradition qui le conduirait sans aucun doute aux Etats-Unis, Julian Assange décide, le 19 juin 2012 d’entrer à l’ambassade d’Equateur à Londres où il demande l’asile aux autorités de ce pays qui le lui accordent deux mois plus tard. Il restera sept ans dans cette représentation diplomatique, faisant l’objet d’une surveillance et d’un espionnage extrêmes.
La collaboration avec les grands médias
Poursuivant sur sa lancée, le 23 octobre 2010, Wikileaks publie 400 000 documents concernant la guerre en Irak, dont beaucoup évoquent la torture couverte par l’armée américaine. Un mois plus tard, le 28 novembre, en collaboration avec cinq grands titres de la presse internationale, Wikileaks commence à diffuser au compte-gouttes plus de 250 000 câbles diplomatiques américains mettant à nu les dessous de la diplomatie des Etats-Unis.
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Source : RT FRANCE